Contrairement au narratif occidental, la guerre russo-ukrainienne n’a pas commencé avec « l’invasion russe » du 24 février 2022, mais change simplement de dimension à partir de cette date. En effet, cette guerre résulte d’une stratégie anti-russe mise en œuvre depuis la disparition de l’URSS, le 25 décembre 1991 et qui, durant la transition post-soviétique de la Russie, vise à la marginaliser sur la scène internationale pour empêcher tout retour de la « menace rouge ». Cette stratégie se radicalise dans les années 2000 contre le régime de Vladimir Poutine, coupable de vouloir reconstruire une grande puissance contre le leadership politico-militaire américain.
L’Ukraine va alors servir de piège géopolitique pour poursuivre l’objectif américain de la Guerre froide d’affaiblissement et d’endiguement (containment) de la Russie, officiellement désignée dans sa doctrine stratégique comme une menace majeure. Dans ce contexte, la révolte du Donbass russophone contre le pouvoir issu du putsch révolutionnaire du Maïdan du 22 février 2014 a été le prétexte pour Washington d’alimenter un conflit larvé pour épuiser l’économie russe et provoquer un changement de régime en Russie – à l’instar du piège afghan anti-soviétique de 1979, concocté par Brzezinski.
Au final, et même si Poutine porte une large part de responsabilité dans ce conflit, le peuple ukrainien a été sacrifié sur l’autel du calcul géostratégique américain structuré contre son ennemi héréditaire, russe.
———-
Docteur en Sciences Économiques de l’université de Grenoble, Jean Geronimo est spécialiste de la Pensée économique et stratégique soviético-russe. Il développe une analyse originale du repositionnement international de l’État russe depuis la fin de la Guerre froide.